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Lusitania 1915 - La dernière traversée

Erik Larson

Le Cherche Midi

  • Conseillé par
    7 avril 2016

    Lusitania 2015 La dernière traversée

    Eric Larson raconte la dernière traversée du grand paquebot britannique Le Lusitania parti de New York le 5 mai 1915 pour gagner Liverpool. En arrivant dans les eaux classées zone de guerre par les allemands, il fut coulé en vue des côtes irlandaises par un U-Boote commandé par le Kapitänleutnant Walther Schwieger. Cet acte de guerre contre un bateau civil fut considéré comme une barbarie. Le navire disparut en dix-huit minutes. La moitié des passagers périt, soit 1198 personnes, parmi eux des ressortissants américains. Si cela contribua à envenimer les relations entre les Etats-Unis et l’Allemagne, il en fallut beaucoup plus au peuple américain et à son président Woodrow Wilson pour déclarer la guerre puisque les Etats-Unis ne rejoignirent le conflit que deux après.

    Je me suis intéressée à ce récit historique pour lequel Eric Larson a bénéficié d’une riche documentation, s’appuyant sur les nombreux témoignages des rescapés, leurs journaux intimes, la correspondance qu’ils entretinrent avec leur famille après le naufrage, les carnets de bord du commandant du Lusitania Turner, et du sous-marin Schwierger, les archives de l’Amirauté britannique et les documents classés secrets de guerre aujourd’hui consultables.
    Et bien sûr, tous ces documents ont le mérite de faire revivre les passagers du Lusitania à travers des témoignages pleins de vie, des anecdotes sur le déroulement du voyage, le déroulement de la vie à bord, les menus. Le récit, en particulier du torpillage, est d’une incroyable précision et la description du géant en train de sombrer entraînant des centaines de passagers dans le gouffre est hallucinante. L’auteur peut décrire les vêtements que portaient certains enfants le dernier jour du Lusitania parce qu’ils ont été trouvés sur les corps qui n’ont pas sombré ou qui sont venus s’échouer tout au long des côtes d’Irlande. Et c’est extrêmement émouvant. On s’attache à tous ceux qui ont une voix dans le récit et bien que l’on sache ce qui leur est advenu, on est tenu en haleine, dans l’attente du danger. Après la lecture, j’ai cherché à retrouver ces personnes dont certaines étaient célèbres à l’époque et j’ai éprouvé de la nostalgie à mettre un visage sur chacun. C’est ce que dit avoir éprouvé Eric Larson au cours de ses recherches, on ne peut pas vivre avec des fantômes pendant si longtemps sans finir par les aimer et c’est ce qu’il nous transmet.

    Pourtant ce n’est pas sur le pathos que repose le récit. Celui-ci est nourri par le contexte historique qui nous permet de mieux connaître l’enjeu énorme entre les pays belligérants, l’Allemagne et la Grande-Bretagne, pour la suprématie maritime. Le contrôle des mers est capital dans une guerre puisqu’il permet d’empêcher le ravitaillement, le réapprovisionnement en armes en maintenant le blockhaus.. Jusqu’alors la Grande-Bretagne avait été souveraine sur la mer mais l’Allemagne était devenue une rude concurrente.. C’est pourquoi les Britanniques font construire ce superbe et rapide navire Le Lusitania dont la vitesse était inégalée. Quant à l’Allemagne, elle va utiliser ses U-Boote, armes que la grande-Bretagne sous-estimait à l’époque. Les exploits des équipages des sous-marins allemands vont considérablement affaiblir l’Angleterre au point de risquer lui faire perdre la guerre. Nous voyons aussi le jeu trouble que l’Amirauté, avec à sa tête Winston Churchill, a joué face à ces attaques de navires sous pavillon neutre (américain) pendant la guerre. Alors que les services secrets britanniques suivaient à la trace le sous-marin du commandant Schweiger, le Lusitania ne fut pas détourné vers une route plus sûre, on ne lui envoya aucun destroyer pour le protéger, ce qui aurait certainement évité la tragédie. Pourquoi? Winston Churchill fut le premier à accuser le commandant Turner de négligence pour mieux cacher les impérities de l’Amirauté et surtout son dessein secret. Plus y aurait de navires neutres coulés, plus vite l’Amérique entrerait dans la guerre.
    Un roman intéressant et bien documenté qui a le mérite de faire vivre l'Histoire.